Pourquoi t’es grosse?

On dit que la vérité sort toujours de la bouche des enfants. Il semblerait que cela marche aussi pour les petits vieux perdant un peu la tête… Cette question, ma mamie ayant une sorte d’Alzheimer me la pose souvent. C’est comme si c’était une déception pour elle…
Il faut dire qu’avec le recul, cette banale interrogation, on me l’a tellement posée dans ma vie (même lorsque j’étais ado avec 20 kg de moins qu’aujourd’hui)…
A chaque fois, j’ai l’envie irrépressible de répondre : « et toi, pourquoi t’es con.ne? »

Ce que pensent les autres, je m’en fous, mais lorsque cela vient d’une personne qu’on estime, c’est parfois plus compliqué à appréhender. Je ne vais pas rentrer dans un discours disant que je me sens bien ainsi, ce n’est pas vrai mais ça ne me persécute pas non plus, je fais avec (de toute manière, on ne peut pas faire sans). Je n’y pense pas, sauf lorsque je trouve des vêtements que j’adore et que je sais avant même de les essayer qu’ils ne m’iront jamais. C’est une grande frustration lorsque l’on aime la Mode autant que moi.

 

La grossophobie, mince ou ronde, on peut toutes y être confrontées un jour ou l’autre. Ce qui m’énerve le plus, c’est lorsque le corps médical s’en mêle :

Combien de fois ai-je dû supporter le discours moralisateur : « Mademoiselle, vous êtes en surpoids, il faudrait penser à maigrir, à bouger plus et à éviter les Mac Do »!

Lol, c’est fou comme notre enveloppe corporelle peut induire de nous… Ça tombe bien, le Mc Do, je n’ai pas dû y mettre les pieds depuis 10 ans (à part pour prendre un café). Je déteste les aliments gras, même si oui, je suis gourmande. J’aime mon poulet sans peau, les plats sans sauce. Je mange un maximum de légumes, de fruits, de produits sains, pas industrialisés, pas de plats préparés, je fais presque tout moi-même. Je mange peu, je n’ai jamais faim. Quand mon père me donne des vivres pour 3 jours, ils m’en font 10.
Je marche entre 5 et 10 km/jour et lorsque mon corps & ma santé me le permettent, j’aime même le footing!
Bref, j’estime avoir une vie saine. Honnêtement, je ne vois pas ce que je pourrais faire de plus pour maigrir, à part cesser de manger!

 

Je n’ai jamais été mince. Je mesure 1,61 et mon poids de forme est autour de 57 kg. Même à ce poids là, adolescente, mes médecins me persécutaient car j’aurais dû en faire, selon eux, pas plus de 48…
Mon poids le plus bas fut 52 kg en 2007, j’étais malade, blafarde, je saignais du nez non stop, je perdais mes cheveux par poignées. J’avais perdu plus de 17 kg en 8 mois sans rien faire, comme ça, d’un coup. Au lieu de chercher le pourquoi du comment, le corps médical me félicitait d’avoir ENFIN fait des « efforts »… et ne me croyait pas lorsque je disais ne pas avoir entrepris grand chose.

Il faut dire que j’ai un soucis d’hypothyroïdie dont je vous parlais ici découverte en 2003. Notre corps ne nous appartient plus avec cette pathologie. Les médecins ne peuvent pourtant pas l’ignorer.

Je me souviens d’une consultation en hôpital en 2011 qui m’a rendu folle de rage, où un éminent professeur m’a dit :

« Vous allez être hospitalisée 1 semaine, vous verrez, la bonne nouvelle c’est que vous allez forcément maigrir. Tout le monde sort plus mince de chez nous« …

J’ai trouvé ça violent… comme si c’était une quête du Graal, alors que j’étais venue faire des examens qui n’avaient rien à voir avec mon poids…
Bref, à la fin du séjour, j’avais pris 1kg et il s’est énervé en disant à ses internes :

« Ben elle a dû dévaliser le distributeur de sucreries du couloir« .

Quel manque de respect envers le patient! Cela n’avait pourtant rien d’étonnant! Chez moi, je ne fais que 2 repas/jour. Là-bas, j’en avais 4, sans pouvoir me dépenser physiquement… Pas besoin de faire 10 ans d’études pour en arriver à une conclusion logique.
Ce qui m’a le plus énervée, c’est qu’au fond, on pense que c’est de notre faute!!!
Il m’a alors fait consulter une diététicienne qui n’a rien pu modifier de mon alimentation car elle a estimé que j’ingurgitais 1400 cal/jour, ce qui n’est, semble-t-il, pas assez lorsque l’on pratique une activité physique…

 

Le grossophobie, j’y ai aussi eu droit plusieurs fois au cours d’entretiens d’embauche. Pas de manière frontale, toujours de manière insidieuse.
Par exemple, une fois, une créatrice de vêtements m’a fait comprendre qu’en plus du salaire, elle offrait les prototypes (tous en taille S/36) à ses employées, et que par conséquent, ne pouvant en bénéficier étant donné que ce n’était pas ma taille, c’était me léser dans ma rémunération que je ne puisse y prétendre. C’était une raison suffisante pour elle d’écarter ma candidature malgré mes compétences et mes 10 ans d’expérience… C’est triste, d’autant plus que je lui achetais régulièrement des fringues malgré ma taille 42/44. Elle a beau tailler petit, j’ai toujours trouvé mon bonheur dans sa boutique.

Ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres.

C’est d’autant plus grave que je fais une taille considérée comme standard, c’est la taille de vêtement de la française moyenne, même si on ne la trouve pas beaucoup en boutique. Alors je n’ose même pas imaginer le quotidien des personnes souffrant d’obésité.

J’ai toujours espoir que les choses changent, que les gens prennent conscience que toutes les questions ne sont pas bonnes à être abordées sans risquer de blesser la personne en face. Je ne pense pas que notre poids résume la personne que l’on est au fond de nous.
J’irais même plus loin en disant que ça peut même être une chance d’être en surpoids, car cela permet au moins parfois d’écarter les personnes inintéressantes & néfastes qui pourraient potentiellement ne s’attacher qu’à notre aspect physique et nous aimer pour ce que nous paraissons plus que pour ce que nous sommes réellement…

 

Illustrations : Jeanne Lorioz Copyright

 

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